Heureuse alternative

L’homme, licencié pour cause économique ( son patron constatant une légère baisse de profits, signe avant-coureur que les choux seraient moins gras, avait délocalisé là où la main d’œuvre travaille pour une bouchée de pain) chercha, après formation, un emploi de jardinier. A l’agence de l’emploi, qui ne fait plus dans la dentelle depuis longtemps, on lui proposa un emploi de manœuvre dans le bâtiment, qu’il déclina poliment. On lui trouva un emploi de plongeur, qu’il refusa également, déclarant qu’il était piètre nageur en eaux troubles. L’agent qui le fichait se mit à voir tout rouge. Il le menaça en ses termes : « Si tu refuses  la prochaine offre, mon vieux, tu seras radié de mes services. Des milliers attendent à la porte et ne font pas la fine bouche. » Quelques jours plus tard, le recruteur lui dénicha enfin un job dans ses cordes : non pas boxeur, ni gymnaste, ni même pianiste, mais auxiliaire d’exploitation agricole, chargé notamment de l’élimination des abeilles, coccinelles, coquelicots et autre parasites fleurissant dans les champs de céréales.

L’homme, appelons le Bob, Ahmed ou Gérard, converti au jardinage biologique depuis le grenelle de l’environnement, flop, répondit vertement à l’agent qu’il œuvrait à présent pour la biodiversité et qu’il ne pouvait accepter un tel labeur : c’était incompatible avec ses convictions.

Il fut, sur le champ, si j’ose dire, radié des assedics et depuis, il a agrandi son jardin, son verger, son poulailler. Il survit en vendant sur les marchés des légumes et des fruits qui ont grossi sans cochonnerie – pardon, petit cochon, de te salir encore, tu n’as pas bonne presse, sauf dans l’assiette– il survit seulement car on subventionne honteusement la reine d’Angleterre ou le prince de Monaco, et les gros exploitants beaucerons ou flamands pour leur blé empoisonné et leur terre morte…

« La PAC* est opaque

Changeons de cap,

Changeons la PAC. »

Chante-t-il en cueillant ses melons

PAC : politique agricole commune, honteusement menée